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jeudi 6 novembre 2014

« Tout-en-camion », la momie qui ne voulait pas prendre le camion


Eh oui, le voyage des momies touchait à sa fin. L’heure était venue pour elle de quitter Grenoble et de retourner à Roanne pour un siècle ou deux.

Que s’est-il passé ? Trouvaient-elles l’aventure trop brève ? La compagnie des pirogues carolingiennes à côté d’elle trop intéressantes ? Le climat de Grenoble meilleur que celui de Roanne ? Ou bien se trouvaient-elles simplement bien à Arc Nucléart, chouchoutées par l’équipe qui s’intéressait à ces grandes dames pharaoniques à l’histoire improbable ? Ce qui est sûr, c’est que la journée prévue pour leur retour ne s’est pas déroulée tout à fait comme prévu.

Les momies sont associées à une légende de malédiction tenace. Au cours des siècles, on les a accusées d’attirer le malheur sur les musées qui en conservaient, sur les personnes qui les étudiaient, mais aussi de faire sombrer les bateaux, d’attirer les tempêtes et bien d’autres choses encore…

Effectivement, c’était bien une tempête qui soufflait ce matin à Grenoble. Comme sur la plupart de la France, certes, mais cette ville entourée par les montagnes est particulièrement impressionnante en cas de gros temps. Le campus du Comité à l’énergie atomique était parcouru de bourrasques de vent glacial et la pluie martelait en continu. Pas le meilleur temps pour charger des œuvres d’art, surtout aussi fragiles que des antiquités égyptiennes. Nous n’avions pourtant pas le choix. 

Pourtant, quand le camion est arrivé, il pleuvait aussi à l’intérieur. La caisse avait été éventrée sans que les conducteurs ne s'en aperçoivent même. Ils n'en croyaient pas leurs yeux. La malédiction des momies a été évoquée par l'équipe d'Arc Nucléart.

En tous les cas, malédiction ou pas, pas question de prendre la route dans ces conditions.

Les momies ont donc gagné un sursis de quelques heures, le temps de trouver un autre camion. 
Pendant ce temps, nous avons ouvert quelques caisses et nous avons pu constater l’efficacité du traitement. Sur la mousse blanche, des vrillettes désormais sans vie, mais aussi des mites, des araignées, et bien d’autres insectes réunis… Tous les habitants clandestins des momies et des sarcophages étaient là, bien visibles. Certains, remontant au plus haut, s’étaient groupés sur le nez d’un sarcophage. Une bonne séance de nettoyage s’impose, à Roanne. 

Quand le deuxième camion est enfin arrivé, il ne possédait des passes pour accrocher les sangles qu'en hauteur. Or, les caisses de momies ne font souvent que 40 centimètres de haut. Nous avons alors commencé, avec les caisses de momies et de sarcophages, à chercher l’ajustement qui permettrait de les tenir les unes les autres, sans risque qu’elles ne bougent sur la route. Comme une gigantesque partie de Tetris, avec des caisses pesant environ 100 kilos chacune. Et une différence, bien sûr, avec Tetris : pas le droit de les retourner.

Finalement, avec 4h30 de retard sur le planning initial, et avec les salutations de l’équipe d’Arc Nucléart, ces dames quittaient enfin Grenoble.

Au musée Déchelette, une réserve a été vidée et nettoyée spécialement pour elles. Elles peuvent maintenant y attendre tranquillement un mois, avant la nouvelle étape. Bientôt, des restaurateurs viendront pour réparer les dégâts des dernières années, et leur permettre de continuer à vieillir avec sérénité. Affaire à suivre… 

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